On parle d'eux

Poésie engagée #1 avec Ambre de La Fumainerie
Poésie engagée #1 avec Ambre de La Fumainerie

Publié le 09/02/2022

Ambre Diazabakana : membre du collectif de "La Fumainerie"

Bordeaux. 26 novembre 2019.

Ambre Diazabakana se tenait debout face à cette foule, prête à énoncer son premier discours. Il est souvent difficile de mettre des mots sur des moments émotionnellement intenses comme celui-ci put l’être. Elle observa en elle comme un étrange mélange de stresset d’excitation, avec un zeste de fierté après l’annonce de cette vraie reconnaissance. Quelques temps auparavant, Ambre ainsi que tout le collectif composé de neuf personnes, avaient été appelé·e·s pour l’obtention du “Prix coup de coeur ESS (Économie Sociale et Solidaire)” décerné par le département. Sous les applaudissements qui suivirent la nomination, elle fixa ces nombreux yeux qui la pointaient du regard. Parmi eux, deux purent se distinguer de tous les autres. Ceux de sa mère brillaient d’admiration pour la détermination dont sa fille avait fait preuve depuis le début de cette aventure. À cet instant, Ambre ne put s’empêcher de repenser aux premières fois où elle lui exposa les tenants et aboutissants de ce projet. Ce moment lui avait valu de nombreuses interrogations, mais rien ne l’avait arrêtée. Et aujourd’hui, elle s’apprêtait bien à énoncer un discours faisant en quelque sorte l’apologie du caca et de son utilisation.

La création de l’association “La Fumainerie” avait été une idée que le commun des mortel·le·s aurait pu trouver farfelue, mais qui n’avait cessé d’animer cette jeune porteuse deprojet. Depuis la découverte des toilettes sèches au cours d’un festival, que l’on y croit ou non, Ambre se souvenait avoir vécu une réelle aventure : du moment où elle avait franchi cette porte, jusqu’au petit geste du poignet qui avait permis de recouvrir de copeaux de bois les odeurs les plus nauséabondes. Imaginer qu’une installation aussi “primaire” pouvait contribuer à réduire significativement sa consommation d’eau avait été une belle cerise sur le gâteau. Certain·e·s auraient appelé ça de la folie, mais ce fut contre toute attente une véritable révélation, qui plus tard l’avait poussée à rechercher pour elle des constructeur·rice·s de ce type de mobilier. Un intérêt cependant rempli de difficultés. La plusimportante étant l’inexistence d’un tel service pour les particulier·ère·s. Tout aurait pu s’arrêter là, si elle n’était pas tombée sur “KK Power”, un collectif déjà engagé sur le sujet et demandeur d’un nouveau souffle pour faire grandir leur projet presque au bord de l’extinction. En décidant de faire partie intégrante de ce groupe, Ambre s’était investie dans un restructuration nécessaire, et avait collectivement fait évoluer les réflexions jusqu’au renouvellement de l’association portant désormais le nom de “La Fumainerie”. Objectif : appuyer le développement d’un système d’assainissement plus écologique en passant par l’installation de toilettes sèches et la collecte de déjections utilisées in fine comme compost.

En cette journée de novembre, Ambre se tenait face à un public emporté par les applaudissements, et pouvait modestement réaliser qu’il était loin le temps où elle ne faisait qu’éveiller sa curiosité sur un groupe de citoyen·ne·s engagé·e·s. Avec du recul, “La Fumainerie” lui avait ouvert les yeux sur la réalité des problèmes liés à l’eau, sur un sujet plusprofond autour de l’assainissement. Ou comment notre corps ingurgite des substances issues d’un écosystème pollué, et le rejette dans un environnement potable sain, ou du moins supposé le rester. Ce projet ne se nourrissait donc pas seulement d’une réflexion autour de la quantité d’eau généralement utilisée, mais aussi sur le moyen le plus écologique de traiter les eaux usées sans en oublier les matières fécales et urinaires rejetées.

Ce soir de remise de prix, une fois le silence installé, Ambre sentit ce vent qui venait désormais de tourner. À quelques mètres de l’estrade, des élu·e·s prêt·e·s à l’écouter, ce qui fit de cet événement un véritable coup de pouce pour la dynamique d’un groupe souhaitant perdurer. D’un revers, leur image d’utopistes se voyait soudainement balayer. Une crédibilité qui réveilla la joie de chaque proche du collectif, dont celle de la mère Diazabakana alors en train de prendre sérieusement conscience que sa fille n’était pas une hurluberlue, ni même une farfelue. Lorsqu’Ambre ouvrit enfin les lèvres, ce fut avec passion. Elle a élevé la voix ce jour-là, persuadée que l’aventure n’était pas prête de s’arrêter là.

RETROUVEZ AMBRE ET LE COLLECTIF DE "LA FUMAINERIE"

Facebook

LinkedIn

Site internet

Découvrez les autres portraits
Poésie engagée #3 avec Elise de BoxEaty Poésie engagée #1 avec Ambre de La Fumainerie Poésie engagée #2 avec Thibault de la Recyclerie Sportive

Retour